L’ouvrier de la onzième heure

L’ouvrier de la onzième heure

Vous connaissez tous cette parabole des ouvriers dans la vigne ou parabole de l’ouvrier de la onzième heure.

Avant d’aller plus loin je voudrais vous faire plusieurs remarques :

– tout d’abord vous dire que l’actualité de nos jours avec les manifestations, les contestations, les ordonnances de la loi travail, que cette actualité n’a rien à voir avec tout cela. Il ne s’agit pas d’une parabole sur la justice sociale. En effet, travailler quelques heures et gagner autant que celui qui a trimé toute une journée n’est pas acceptable.

Non, il ne s’agit pas du tout de cela.

– autre remarque ; l’expression « ouvrier de la onzième heure » est restée dans le langage courant et est employée même si les gens ne connaissent pas l’évangile.

– enfin, on nous parle des ouvriers, au pluriel, de la 11 ème heure. Le patron, en sortant à 5 heure de l’après-midi en trouva plusieurs qui étaient là et qui attendaient. Ainsi, ils étaient beaucoup à attendre pour travailler. Le chômage faisait déjà des ravages dans la société de l’époque.

De plus, à force de se focaliser sur ces pauvres bougres de la 11è heure et sur leurs salaires, à force de se focaliser sur la deuxième partie : le salaire donné aux uns et aux autres, on en oublie le reste de la parabole.

Certes, la pointe de la parabole, c’est à dire l’élément clef se résume en une phrase : «  les premiers seront les derniers et les derniers seront les premiers ». C’est l’enseignement final.

Mais cette parabole comme beaucoup d’autres, a plusieurs pointes, plusieurs points forts, plusieurs enseignements.

Ainsi, on se focalise souvent sur la fin, mais ici, je vous propose de réfléchir sur le début, parce que le début est, aussi, très profond.

La parabole commence ainsi, je vous la relis: « Le Royaume des cieux est comparable, en effet, à un maître de maison qui sortit de grand matin, afin d’embaucher des ouvriers pour sa vigne ».

Ainsi, le maitre veut embaucher pour aller travailler dans sa vigne.

Cette vigne c’est quoi ? Dans la bible, nous le savons, c’est à la fois le monde qui attend le salut, monde dans lequel nous vivons ; mais c’est aussi le royaume de Dieu qui a besoin d’ouvriers pour que ce salut de Jésus puisse atteindre toute la vigne, puisse atteindre le monde entier.

A la fin de l’évangile de Matthieu, on aura un grand commandement : « allez et enseignez toutes les nations, faites des disciples»

Donc il s’agit clairement de l’évangélisation, de la mission confiée aux chrétiens, confiée à chacun de nous.

Le maitre de la vigne, le Seigneur embauche, embauche tout le monde. Personne ne doit rester sans rien faire. C’est un des premiers enseignements de cette parabole.

Vers 5h de l’après-midi, il sorti et en trouva d’autres qui étaient là et il leur dit : « Pourquoi êtes-vous resté là toute la journée, sans rien faire. » Voilà, c’est de cela qu’il faut partir.

Certains parmi nous, ont peut-être envie de répondre tout de suite : « mais Seigneur, je ne reste pas là à rien faire, Seigneur mes journées sont tellement remplies ».

Même les retraités disent souvent : « depuis que je suis à la retraite, je n’ai jamais été autant occupé »

C’est, donc, l’inverse de la parabole où les ouvriers disent: « personne ne nous a embauchés. », car nous avons tendance à dire : « mais Seigneur tout va bien, mes journées sont pleines, j’ai tout ce qu’il faut »

Si on est là repu, si on est bien gras, avec un cholestérol spirituel et physique (et je parle bien sûr du mauvais cholestérol), si on dit « ouais Seigneur, j’ai tout ce qu’il faut, je te connais, je te sers, je vais au culte le dimanche, je participe à la collecte, je suis un bon chrétien, je fais même parti du conseil presbytéral, c’est génial ! » alors oui, l’évangile ne peut pas nous parler ce matin.

Certains d’entre vous se disent déjà : on le voit venir le prédicateur, il veut encore nous embaucher, il a besoin de monde pour la boutique, pour la paroisse. Et bien, non….. Quoique…. Peut-être notre pasteur Stefano ne serait pas mécontent….

Mais ce n’est pas de cela dont je vous parle.

La parabole doit nous bousculer; car elle nous lance la question fondamentale : par qui voulons-nous être embauché ? Ou en d’autres termes, qui voulons-nous servir ? Pour qui voulons-nous travailler ? Pour qui voulons-nous remplir nos journées ? Comment voulons-nous remplir nos journées concrètement ? Pour les hommes ? Pour le monde ? Pour nous-mêmes et notre petit égo ?

Ou pour le Seigneur, pour ses intérêts, pour le Royaume, pour sa vigne.

Le Seigneur qui répond aux ouvriers, nous dit à nous aussi « allez à ma vigne vous aussi » Ainsi, à tous, ouvriers de la première heure comme ceux de la dernière heure, il leur dit : « allez à ma vigne vous aussi » Pour les derniers, il aurait pu dire : « ça y est, on a fini la journée, on va fermer ». Non, il dit : « allez vous aussi à ma vigne ».

Comment est ce que je me situe face à cette à cette invitation du Seigneur qui me dit « j’embauche, va toi aussi à ma vigne, il y a du travail pour toi, avec ce que tu es, même si tu trouves nul, même si tu ne sais pas ce que tu vas pouvoir faire dans ma vigne, il y a du boulot pour toi, quelque soit ton âge. Il y a du boulot pour toi dans mon Royaume quelque soit ton état physique, ton état moral, ta situation familiale, et ne parlons pas de ta situation économique, il y a du travail pour toi. »

Le problème, mon problème, le vôtre peut-être aussi, c’est que souvent je réponds à Jésus : je suis surbooké, mes journées sont hyperchargés, je n’ai pas une minute à moi, je suis superoccupé.

Et là, nous touchons un point essentiel qui est une des causes principales du fait que nous ne goutions pas le bonheur que Jésus veut nous donner quand il dit : « il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir », quand il dit « je ne suis pas venu pour être servi mais pour servir, et donner ma vie pour la multitude ».

Luc dans son évangile nous dit les choses un peu autrement : « cherchez d’abord le royaume de Dieu et tout le reste vous sera donné par surcroit ».

Mais faire cela ne veut pas dire : je vais chanter toute la journée  « Alléluia »  puis je vais me mettre dans ma chaise longue et attendre que l’argent tombe du ciel. Cela ne veut pas du tout dire être passif, être paresseux ou être dans les nuages.

Cela veut dire, mettre en priorité les intérêts du Seigneur dans ma vie ; cela veut dire passer au crible du critère du Royaume, oui, passer au crible tous les domaines de ma vie ; c’est me demander quel pourcentage de temps et d’énergie je consacre à l’essentiel, dans ma vie à travers mon travail, mes responsabilités, ma famille.

En d’autres termes, mais c’est toujours la même question que je vous décline en plusieurs nuances : à quel niveau est ce que je veux vivre ma vie : est ce que je veux la vivre au ras des pâquerettes ou est ce que je veux la vivre en profondeur ? Est ce que je veux la vivre au niveau de l’évangile ?

Encore en d’autres termes, comment est ce que je veux vivre ? Je veux vivre comme un enfant de Dieu ? Ou un enfant de ce monde ? Est ce que je veux me laisser guider par tout ce que me propose le monde ? Et ce monde en propose tellement de choses qui peuvent me noyer, qui peuvent obscurcir le regard que je pose sur ma vie. Par exemple, l’inflation des médias, les informations qu’on vous répète du matin au soir. Nous sommes remplis de toutes sortes de futilités du matin au soir et même du soir au matin, même à ne plus en dormir une partie de la nuit.

Je ne suis pas entrain de dire qu’il ne faut pas se divertir, ne pas regarder un bon film, ne pas passer du bon temps avec des amis ; je ne suis pas entrain de dire, non plus, qu’il faut être une grenouille de bénitier. Non pas du tout, nous sommes appelés à vivre, bien dans ce monde mais avec quel objectif, avec quelle priorité ?

« De quoi est rempli ma vie ? Pour qui je travaille ? Fondamentalement pour qui je donne ma vie ? Et même si j’ai un super travaille qui me plait, est ce uniquement pour cela que je veux vivre ? Est ce que c’est cela qui va remplir ma vie ? »

Nous sommes mis, avec ce passage de l’évangile, devant une interrogation fondamentale: « par qui je veux être embauché ? Pour qui je veux vraiment travailler ? » Et de la réponse que nous donnons à cette question dépend notre bonheur, dépend la profondeur de notre vie.

Le monde a terriblement besoin non pas de supermen, de super chrétien qui seraient meilleurs que les autres mais de témoin de ce Christ ressuscité qui est venu sauver le monde.

Souvent nous ne répondons pas à l’appel parce que nous n’écoutons pas. Et nous n’écoutons pas parce que nos vies sont pleines, nos têtes sont pleines, parce que nous sommes bombardés de messages et que nous ne nous arrêtons pas pour chercher le Seigneur, et lui dire par la prière « Seigneur, qu’est ce que tu veux que je fasse ? Et, qu’est ce que tu veux que je laisse de côté pour dégager du temps pour toi ? « Seigneur montre-moi la route, guide-moi ».

Allez, chiche, venez on va travailler dans sa vigne.

Amen

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