Culte du 22 mars

Culte du 22 novembre

Voici une méditation offerte par un prédicateur la1que

Daniel 7 : 1-14                Apocalypse 3 : 14-22

l’Eglise de Laodicée 

Nous voici ce matin devant un texte tiré du dernier livre de la Bible, ce livre appelé l’Apocalypse du terme grec qui signifie « révélation », lui-même issu d’un verbe signifiant « lever le voile ».

Quel paradoxe devant un texte déroutant, difficile et codé…Mais une bonne connaissance du Premier Testament donne déjà des points de repère. On trouve de corrélations nettes avec l’Exode, les livres prophétiques, mais surtout la littérature apocalyptique d’Ézéchiel, Zacharie et surtout Daniel avec par exemple sa vision des quatre bêtes que nous avons lue (Daniel 7 à rapprocher d’Apocalypse 13).

Ce courant littéraire apocalyptique connut un grand essor, depuis l’exil des israélites à Babylone jusqu’au 1er siècle après JC. C’est une littérature de crise apparue après le retour de l’exil qui n’avait apporté que désillusions. On n’attend plus rien de l’histoire et seul un bouleversement divin peut rétablir le peuple dans son indépendance. Les puissances hostiles qui se succéderont sont décrites comme l’ennemi suprême qui sera définitivement détruit : l’empire persécuteur en Daniel 7 est retrouvé en Apocalypse 13, 17 et 18.

L’Apocalypse porte des traces de cette crise. La communauté chrétienne de la fin du 1er siècle, se refusant au culte de l’Empereur, a été en butte à des persécutions parfois cruelles (rappelons-nous Néron accusant faussement les chrétiens d’avoir mis le feu à Rome en l’an 64). Des tensions apparaissent fatalement entre les chrétiens « en première ligne » portés à l’intransigeance, et ceux qui, relativement épargnés, acceptent des compromis jugés raisonnables (ainsi l’église de Laodicée stigmatisée comme tiède).

Le langage est chargé de symboles et de métaphores (avec des nombres : ensembles de sept, symboles de plénitude, et avec des couleurs) pour nous mener à la clé de voûte de cet édifice : la révélation de Jésus-Christ. L’Apocalypse n’est pas un ensemble ésotérique de prédictions annonçant des événements historiques, mais avant tout la révélation d’une personne. Cette personne est le Fils même de Dieu et visions et images abondent pour nous amener à l’ineffable. Les royaumes et les puissances temporelles se succèdent, avec leur lot de souffrances et d’oppressions, mais l’Apocalypse donne aux élus de Dieu la certitude qu’ils sont, envers et contre tout, du coté du vainqueur « il aura sa demeure avec eux, ils seront ses peuples…Il essuiera les larmes de leurs yeux, la mort ne sera plus et il n’y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur, car les premières choses auront disparu » (Ap 21 :3)

 

Après ces généralités sur l’Apocalypse, attardons-nous un peu sur Laodicée :

Si l’on ouvre le dictionnaire, Laodicée, sur le fleuve Lycus, capitale de la Phrygie en Asie Mineure, était une ville riche, un point stratégique sur des routes commerciales. Il y avait là aussi un marché spécifique, celui d’une laine noire, rare et chère, qui servait à produire des vêtements recherchés par les plus riches de ce temps-là. Les métaux précieux y étaient abondants et des fondeurs spécialisés savaient les épurer des alliages que les faussaires du temps y ajoutaient. Galien et Aristote, géants de la science antique, ont vanté dans leurs œuvres, un collyre et un onguent pour les oreilles, élaborés en ce lieu.

A Laodicée on bénéficiait aussi de bains idéalement tiédis, parce que la nature avait disposé là des sources chaudes et des sources froides (le célèbre site de Pamukkale, le « château de coton », est proche). Mais le volcanisme provoque parfois des séismes. Ce fut le cas pour Laodicée. L’on sait qu’hier comme aujourd’hui, en cas de ravage, la puissance centrale offrait ses services pour la reconstruction. En l’an 70, Laodicée fut ravagée par un tremblement de terre et, lorsque l’offre lui parvint d’une aide à la  reconstruction, elle  fit la réponse que voici : « Nous sommes suffisamment riches, nous n’avons besoin de rien. » Mais qui n’a besoin de rien ni de personne ?

 

Dans les 3 premiers chapitres,  Jean a une vision du Christ glorifié et s’adresse aux sept églises d’Asie Mineure d’Ephèse, de Smyrne, de Pergame, de Thyatire, de Sardes, de Philadelphie et de Laodicée. Dans ces lettres, chaque église se voit signifier successivement  la reconnaissance de ses mérites, des reproches et une exhortation suivie de promesse.

Pour certains exégètes, l’ordre de ces Eglises de la plus louable à la plus éloignée de Dieu, pourrait être chronologique et nous serions actuellement dans la période tiède de Laodicée.

Les qualités de l’Eglise de Laodicée : le Seigneur n’en mentionne aucune. Et pourtant, on le verra, il aime son Eglise.

Des reproches par contre, elle n’en manque pas :

Laodicée représente l’Eglise de l’illusion… illusion sur son propre état. L’évaluation de ses compétences diffère de celle que fait le Seigneur. Elle se croit riche, pense n’avoir besoin de rien, mais Dieu a une opinion contraire. L’état d’esprit de la cité a pénétré dans l’Eglise et déteint sur les fidèles : ils se croient spirituellement riches, mais se trompent. Six adjectifs résonnent comme autant de coups de canons: tièdes, malheureux, misérables, pauvres, aveugles et nus.

Ainsi est décrite la condition spirituelle de ces fidèles selon la pensée de Dieu. Ils ne connaissent pas la vraie gloire du Seigneur, ignorent les richesses spirituelles de sa Parole et sont étrangers à la vie d’abondance authentique. Ils ne savent pas élever leurs pensées jusqu’aux choses d’en haut, restent prisonniers de celles de la terre, n’ont pas de discernement. Dans une ville où l’on soigne les yeux et fabrique un collyre de qualité, les yeux de leur cœur sont dans un état pitoyable. Dans une cité qui fabrique d’excellents textiles, ils n’ont pas le privilège d’être revêtus des habits de fin lin de la pureté de Dieu.

Alors, le Seigneur va proposer des remèdes :

 

Car le Seigneur aime les fidèles de Laodicée, il désire les sortir de leur état et les amener à une complète restauration. Il leur conseille d’acheter de l’or éprouvé par le feu, synonyme de la gloire divine. S’ils le font, l’espoir leur sera rendu. Leurs difficultés, leurs épreuves reprendront leurs dimensions réelles c’est-à-dire infimes face à la beauté et à la gloire divines.

Le Seigneur leur conseille encore d’acheter des vêtements blancs. Remarquons le contraste de couleurs par rapport à l’industrie de la laine noire de la région de Laodicée. Ces vêtements blancs de la pureté nous sont indispensables pour vivre l’éternité avec le Seigneur dans un état qui ne connaîtra ni imperfection, ni péché.                                                                                                                                    Ils ont aussi besoin d’un collyre, symbole du discernement de l’Esprit saint  pour soigner leurs yeux.

 

Qui est tiède ?

 

Il nous est proposé de considérer comme tiède celui qui dit « je n’ai besoin de rien ». Besoin de rien, besoin de personne, il bat lui-même sa propre monnaie, se donne raison à soi-même, se soigne lui-même, possède tout en lui-même, considère que nul ne peut rien lui apporter et qu’il n’est même pas nécessaire d’ouvrir la porte à celui qui frappe.                                                                       Et il y a plus encore, c’est que le propre du tiède est de ne jamais se savoir tiède, car de qui donc pourrait-il l’apprendre, lui qui n’a rien à recevoir de personne ? Le tiède, c’est toujours l’autre…

Ce ne sont pas les exemples de chrétiens fervents et brûlants qui manquent, avec nos ancêtres Camisards, « fous de Dieu » de J.P Chabrol. Et tous ces prédicants qui quittaient la sécurité genevoise pour parcourir Drôme et Dauphiné à cette époque.

Tièdes, Dietrich Bonhoeffer, pendu par les nazis en 1945 et ses amis de l’Eglise Confessante allemande ?

Tièdes, ces coptes dont les églises sont régulièrement lieux d’attentats sanguinaires, et qui se font tatouer courageusement des croix ? Et tous ces chrétiens du Moyen Orient dont la simple existence dérange leurs compatriotes musulmans.

Tièdes, ces chrétiens d’Extrême Orient emprisonnés pour leur foi et pour lesquels l’ACAT demande notre aide ?

 

Vous me permettrez cependant de nuancer un peu ce reproche de tiédeur en rappelant combien de massacres ont été faits par des « chauds bouillants » « au nom de Dieu » ou au nom d’idéologies utilisant son nom : « tuez-les tous, Dieu reconnaitra les siens » disait Amalric, légat du pape lors de la croisade des Albigeois, « Gott mit uns : Dieu avec nous » était-il gravé sur les ceinturons des soldats allemands . Les fous de Dieu modernes sont entre autres islamistes et il ne fait pas bon, chrétien ou yezidi, tomber entre leurs mains.

 

Je voudrais cependant partager avec vous l’histoire exemplaire de l’église d’Allemagne de l’Est à la fin des années 80 : c’était la fin du régime communiste d’Honnecker, et la population n’aspirait qu’à la liberté. Des pasteurs ont pris la tête de cette croisade, les temples étaient trop petits et les jeunes très nombreux. Le mur de Berlin est tombé en 1989 et depuis, la pratique religieuse s’est réduite comme peau de chagrin. La ferveur s’est transformée en tiédeur indifférente, et en satisfaction de ses besoins et de soi-même. N’en est-il pas un peu de même de nous, occidentaux qui nous croyons riches ?

 

Et maintenant, qu’en sera-t-il du tiède ? Et bien le tiède sera vomi de la bouche du Christ glorifié, le texte est incontournable et il est dur. Mais vomir quelqu’un n’est pas nécessairement le rejeter comme un organisme rejette un aliment indigeste. Vomir quelqu’un peut être aussi lui adresser des propos sévères. Et les propos ici tenus envers Laodicée sont particulièrement sévères. Mais quelles que soient nos fautes, Dieu propose des voies d’amélioration. Dans 2 Timothée 3 : 16, Paul écrit « Toute Ecriture est inspirée de Dieu et utile pour enseigner, pour réfuter, pour redresser, pour éduquer dans la justice, afin que l’homme de Dieu soit à la hauteur, parfaitement équipé pour toute œuvre bonne »

 

Rien de ce en quoi vous avez foi n’est digne de foi. Et si vous n’avez foi qu’en vous-mêmes vous n’êtes que des sans foi, des sans vie en puissance. Il y a effectivement dans ce fragment une idée très dure, très belle et très simple : qui se rend étranger aux humains est étranger au Christ. Et ces propos sont un appel à la conversion, un appel à se bouger, à appel à s’ouvrir et non pas une menace. Un appel à la conversion qui serait une menace ne serait pas un appel à la conversion. On ne vend pas le salut de Dieu et la miséricorde de Dieu en faisant peur aux gens. On les appelle…

 

En conclusion :

Quand fatigués, peut-être, de remettre constamment notre ouvrage sur le métier, nous nous laissons aller à la raison du plus fort ou du plus nombreux, prêtons un instant l’oreille, au moins un instant, et entendons que l’on frappe à notre porte. C’est l’Amen qui frappe à la porte de notre existence pour entrer chez nous, pour communier avec nous et nous avec lui.

« Amen », c’est le nom de Dieu en Esaïe 65 : 16, « Quiconque se bénira dans le pays se bénira par le Dieu de l’Amen, et quiconque prêtera serment dans le pays prêtera serment par le Dieu de l’Amen ; car les détresses passées seront oubliées, elles seront cachées à mon regard ». La traduction grecque  a rendu Amen par alètinon, ce qui signifie « ce qui est vrai », ce qui est assuré, établi. De même, quand Jésus dit « amen, amen, légo umin », cela est souvent traduit par « en vérité, en vérité, je vous le dis ». Plus que la vérité, c’est l’exigence de vérité, le désir de vérité, ce qui permettra d’atteindre un niveau supérieur de vérité.

Notons que la vérité ne vient pas nous frapper directement ; elle ne s’impose pas à nous de manière brutale : elle frappe à notre porte et il nous appartient de lui faire bon accueil – ou non. Dieu n’est pas ce qui nous corrige en nous frappant, mais en s’invitant à notre table, ce qui est considérablement différent. Dieu frappe à notre porte, dont seuls nous avons la poignée,  pour entrer dans notre existence dans une relation positive. Cela nous indique le caractère effectivement étrange de la vérité qui se présente sous les traits d’un étranger qui vient à nous et avec lequel nous allons nous nourrir. La vérité n’est pas en nous de toute éternité ; nous n’avons pas la science infuse. La vérité se découvre dans le dialogue avec l’autre, l’altérité. La vérité n’est pas là : elle vient, et nous pouvons lui faire bon accueil, pourvu que nous acceptions de sortir de notre tiédeur. Non, n’ayons pas le profil de suivistes, de tièdes vivant de l’air du temps avec nonchalance. Par la foi, soyons froids à l’égard de ce que nous découvrons opposé à l’espérance que Dieu suscite en nous et bouillants quand il s’agit de mettre les couleurs de l’Evangile dans notre vie.

 

Amen

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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